FONCTION PUBLIQUE : FAIRE RECONNAÎTRE UN ÉPUISEMENT PROFESSIONNEL, OU BURN OUT, EN MALADIE PROFESSIONNELLE.

Publié le 11 janvier 2024 à 13:48

En droit de la fonction publique, un fonctionnaire qui souffre d’un syndrome d’épuisement professionnel, ou burn out, en raison de ses conditions de travail, peut demander à ce que cette maladie soit reconnue comme maladie professionnelle.

Une procédure particulière, souvent longue, doit être suivie pour en obtenir la reconnaissance. Si la maladie est reconnue comme maladie professionnelle, le fonctionnaire va conserver l’intégralité de son traitement jusqu’à ce qu’il soit apte à reprendre, ou jusqu’à sa mise à la retraite.

1. Quelles sont les conditions pour que l’épuisement professionnel soit reconnu comme maladie professionnelle ?

En droit de la fonction publique, pour qu’un épuisement professionnel, ou burn out, soit reconnu imputable au service, il doit être essentiellement et directement causé par l’exercice des fonctions et entrainer une incapacité permanente à un taux déterminé.

Cette définition a été précisée par le Conseil d’Etat. Selon la Haute Juridiction,

« une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l’exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu’un fait personnel de l’agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l’aggravation de la maladie du service ».

Dans cette même décision, le Conseil d’Etat a également précisé qu’il n’était pas nécessaire de démontrer une volonté délibérée de l’employeur de porter atteinte aux droits, à la dignité ou à la santé de son agent, pour que la maladie soit reconnue imputable au service. Autrement dit, les conditions de travail du fonctionnaire peuvent être regardées comme directement à l’origine de l’épuisement professionnel, alors même qu’il n’y aurait pas de volonté de nuire de son administration.

Le Conseil d’Etat a également précisé de longue date que la maladie ne doit pas nécessairement être en lien exclusif avec le service pour être reconnue comme maladie professionnelle. Autrement dit, un état préexistant n’empêche pas nécessairement la reconnaissance de la maladie professionnelle.

A titre d’illustration, la Cour administrative d’appel de Paris a jugé que le fait que des soucis familiaux ont pu aggraver un état anxiodépressif ne faisait pas obstacle au caractère professionnel de la maladie, dès lors que l’apparition de la maladie était en lien direct et certain avec les conditions de travail.

De la même manière, la Cour administrative d’appel de Nantes a jugé que le fait qu’un fonctionnaire présente des « traits de personnalité sensible » n’empêche pas la reconnaissance de l’imputabilité au service de son épuisement professionnel dès lors qu’il peut être établi par ailleurs un lien direct et certain entre cette maladie et ses conditions de travail.

2) Et en pratique, comment demander la reconnaissance de la maladie professionnelle ?

Le délai pour demander la reconnaissance de l’épuisement professionnel, ou burn out, comme maladie professionnelle en fonction publique est de deux ans, à compter du premier diagnostic de la maladie. En pratique, et dans la majorité des cas, le délai de deux ans commencera à courir à compter du jour où le médecin a inscrit sur l’arrêt de travail du fonctionnaire qu’il souffrait d’un syndrome d’épuisement professionnel, ou burn out (et ce même s’il ne remplit pas un formulaire de maladie professionnelle, mais un simple arrêt de travail ou un certificat médical).

Pour que la maladie soit reconnue comme étant d’origine professionnelle, le fonctionnaire doit en faire la demande à son employeur.

Ensuite, il sera le plus souvent expertisé par un médecin agréé, dont la mission sera de donner un avis sur le lien entre la maladie et les conditions de travail, et sur le taux d’incapacité né de cette maladie.

Le dossier sera ensuite transmis au conseil médical pour avis. Il est possible de présenter des pièces et des observations devant le conseil médical.

Il faut savoir que l’Administration n’est pas tenue de suivre l’avis du médecin agréé ou du conseil médical. Ces avis sont rendus pour éclairer l’Administration dans sa prise de décision, mais c’est bien l’employeur qui décide en dernier lieu.

Si la maladie est reconnue comme maladie professionnelle, le fonctionnaire sera placé en congé pour invalidité temporaire imputable au service (CITIS). Il conservera ainsi l’intégralité de son traitement jusqu’à ce qu’il soit apte à reprendre, ou jusqu’à sa mise à la retraite. Il s’agit d’une différence majeure avec les autres congés de maladie, qui sont tous limités dans le temps.

Le fonctionnaire atteint d’une maladie professionnelle reconnue a également droit au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par sa maladie.

3. Et si la demande est rejetée ?

Si la demande de maladie professionnelle est rejetée, il est possible de former un recours gracieux ou hiérarchique, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de rejet.

Il est également possible de saisir le juge administratif, soit immédiatement contre la décision de rejet, soit, en cas de recours gracieux ou hiérarchique, en cas de rejet de ce recours.

Le délai pour saisir le juge administratif est également de deux mois à compter de la réception de la décision de rejet initiale (rejet de la demande de maladie professionnelle), ou de la réception de la décision de rejet du recours gracieux ou hiérarchique.

Attention, le silence gardé sur un recours gracieux ou hiérarchique pendant deux mois fait naitre une décision implicite de rejet. Cette décision implicite de rejet doit être contestée dans un délai de deux mois.

Enfin, bien que le congé de longue maladie (CLM) soit moins protecteur que le CITIS, il est possible, en cas de rejet de la demande de maladie professionnelle, de solliciter à défaut le bénéfice d’un CLM (et sa transformation en congé de longue durée au bout d’un an).

 

Sources Village de la justice par Claire Lachaux, Avocat, Barreau de Nantes

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